Scènes de genre (1)

Gauche plurielle... et féminine !

< mardi 27 janvier 1998 >
Chronique

Dans toute polémique qui se respecte, la vérité se trouve rarement d'un seul côté. Il semble bien que ce doive être une nouvelle fois la règle dans la controverse qui a mis aux prises, il y a peu, la gent féministe et celle qu'il est convenu d'appeler, en dépit de ses antécédents nettement masculins, la vieille dame du quai Conti. Il s'agit d'ailleurs là de la reprise d'un feuilleton déjà ancien, l'un des rares que la France ait réussi à vendre à l'étranger puisque la Belgique, la Suisse et le Québec se sont spontanément portés acquéreurs... Bornons-nous aujourd'hui à en rappeler la distribution, nous n'aurons pas trop de quatre rubriques pour donner notre avis sur le scénario ! À notre gauche, donc (et cela dit sans arrière-pensée aucune, quand bien même, comme au plus beau temps de la guerre du nénufar, certains journaux d'opinion se seraient déjà déterminés en fonction de leurs sympathies politiques supposées), des femmes ministres qui, pas plus qu'elles ne mettent leur drapeau dans leur poche, n'entendent cacher leur sexe derrière leur maroquin. Méfiantes, par tradition, à l'égard d'une grammaire qu'elles taxent volontiers de machisme (qui contestera que, des siècles durant, notre langue, codifiée par des hommes, l'ait été plus ou moins consciemment pour eux ?) ; désireuses, de surcroît, de rendre plus « visibles » leurs récentes et incontestables avancées dans le monde du travail et de la vie publique, ces dames n'insistent-elles pas, à présent, pour qu'on leur donne du « madame la Ministre » ? À notre droite, Maurice Druon, pas mécontent de rappeler au passage que c'est aux immortels, et à eux seuls, qu'il revient de statuer sur les questions de terminologie. Le temps de rallier à son panache vert la moitié des femmes que compte l'Académie en la personne d'Hélène Carrère d'Encausse, il prend feu contre cette propension à confondre le genre avec le sexe. Thèse déjà brandie contre Yvette Roudy en 1984, contre le secrétaire perpétuel de l'Académie royale de Belgique dix ans plus tard, et que nous nous proposons de passer au crible dans deux semaines...