L'homéopathie remboursée plus chichement...

Le granule est dur à avaler !

< mardi 7 octobre 2003 >
Chronique

Faut-il voir là une tardive reconnaissance du « principe de similitude », si cher aux homéopathes ? Toujours est-il que leurs médicaments pâtissent, tout comme leurs concurrents allopathiques, de la volonté gouvernementale de réduire les dépenses de santé : ils ne seront bientôt plus remboursés, on le sait, qu'à 35 %... Un remède de cheval qui, est-il besoin de le préciser, fait ruer dans les brancards les tenants de cette médecine douce. La pilule — pardon, le granule — a bien du mal à passer ! Comme a du mal à passer (tenons-nous-en à l'aspect linguistique du débat) le genre de ce dernier mot : ceux qui persistent, avec juste raison, à en faire un masculin ont de plus en plus tendance, eux aussi, à se diluer dans la masse ! Il faut dire que rude est la concurrence de la gélule et de la pilule susdite. Et avouer dans la foulée que ces termes en -ule comptent parmi les plus traîtres de notre lexique. Pour quelques testicules qui ont le bon goût de concilier nature et grammaire, combien d'ovules qui, sous cet angle, ...trompent énormément ? Combien de forficules qui, sans vergogne, changent de sexe en passant de Larousse à Robert ? Combien de manipules pour piéger Pivot en personne, son recueil de dictées en faisant, page 399, de curieux féminins ? Pour un peu, on donnerait raison à Ted Stanger, ce journaliste américain qui stigmatise, dans un récent ouvrage intitulé Sacrés Français ! (Michalon), la complexité de notre langue : « Serait-ce trop demander, écrit-il, de renoncer à donner un genre aux substantifs ? Cette question embête les Américains et puis... à quoi ça sert ? Que le mot parapluie soit masculin ou féminin, cela ne change pas le prix du camembert au marché. (...) Dieu merci, l'anglais, langue des grands paresseux, a renoncé à cette pratique il y a de ça mille ans. » Qu'opposer à cet assaut de bon sens, si typiquement anglo-saxon ? Du mépris, certes non : notre monde moderne, plus épris de communication que de culture, plébiscite chaque jour davantage ce souci d'efficacité. Mais peut-être cette forme de foi qui, précisément, lie l'usager à l'homéopathie ; ne lui demandez ni pourquoi ni comment cela fonctionne, il sait (il croit ?) seulement que cela agit. Gardons-nous donc de toucher à ce granule que la tradition a fait masculin et laissons-le fondre, tel qu'il est, sous notre langue française. Si l'on veut, à l'instar du styliste, que les mots fassent l'amour dans la phrase, il faut bien qu'ils aient un sexe, non ?