Championnat de France d’orthographe

M. Bruno Dewaele :
« D’abord oublier tout cela »

Jean HOUCKE
La Voix du Nord (Hazebrouck)
8 octobre 1985

« D’abord, oublier tout cela... » Telle est la première préoccupation de M. Bruno Dewaele, professeur de lettres au lycée des Flandres, sacré samedi après-midi, au studio des « Grosses têtes », un lieu où l’esprit souffle en courants d’air, champion de France toutes catégories d’orthographe. « Oublier tout cela », c’est surtout se reposer d’un travail assez exténuant. Toutes les vacances et tout son temps libre, M. Dewaele les a passés à consulter dictionnaires, glossaires et grammaires. Six à sept heures de tête-à-tête avec Larousse et autres, tel était le menu quotidien qui lui a permis de décrocher la timbale de la « garden-party ».

Le lauréat a trouvé le texte plutôt facile par rapport aux épreuves préliminaires et enfantin en comparaison des tests effectués avant la dictée. Ces tests devaient, en principe, départager les ex æquo.

Une faute et demie

Les correcteurs, qui comptaient une faute par syllabe, l’ont pénalisé d’une erreur et demie. La première faute rend hommage à sa tempérance. Il a, par tactique et dans le doute, écrit « résiné », le vin, de la même manière que son homophone raisiné, la confiture, que l’on savourait en début de dictée. La demi-faute est vestimentaire. Il a habillé de traits d’union superfétatoires l’expression se mettre sur son trente et un. Par contre, les termes d’usage peu courant comme coquemars, scorsonère ou butyreux ne lui ont posé aucun problème. Sa crainte était de commettre des erreurs d’inattention.

Ce championnat ne lui a laissé qu’un regret, le titre de la dictée : « Garden-party ». Pourquoi avoir affublé d’un mot anglais une épreuve destinée à magnifier la langue et qui, circonstance aggravante, avait trait à une spécialité bien française... la gastronomie ?

M. Dewaele a gagné, outre le titre, un tour du monde de la francophonie.

Un recueil de nouvelles

Défendra-t-il son titre ? Le règlement l’exclut, mais il est possible que Bernard Pivot ouvre l’épreuve à tous les candidats francophones de la Terre. Pour le moment, pas question de se replonger dans les dictionnaires. Il a d’autres projets et d’abord terminer un recueil de nouvelles. Il a déjà publié deux livres d’humour fort appréciés des malades, des vacanciers et des connaisseurs : La Danse du scalpel, aimable satire des milieux hospitaliers et Comme sur des roulottes, évocation très personnelle de l’art du caravaning.

Harcèlement téléphonique

Fêté par ses élèves, félicité par ses collègues, en proie dès dimanche à un harcèlement téléphonique dont la Saint-Bruno n’était pas le seul prétexte, il n’a jusqu’à présent rien reçu de son ministre de tutelle. Dommage. Il eût été si drôle que le télégramme de M. Chevènement contînt quelque savoureux pataquès...

Comme depuis l’affaire Ceccaldi, d’infamante mémoire, Hazebrouck n’avait plus décroché la « une » de la presse écrite, M. Sergheraert, député-maire, a décidé d’organiser une réception en l’honneur du champion. On lui prête l’intention d’y inviter M. Bernard Pivot. Le champagne traditionnel y serait remplacé par un résiné, lequel arroserait quelques solides tranches de « koekestut » tartinées pour la circonstance de raisiné.