Quand Jules est au violon...

(Comines, 2014)

... et Simenon à l'accordéon, le polar prend une tout autre épaisseur. Au diable les intrigues tarabiscotées, les canevas machiavéliques, les déductions intellos qui, quelque élémentaires qu'elles soient dans la bouche d'un Sherlock Holmes, n'en paraissent pas moins labyrinthiques aux besogneux Watsons que nous sommes tous ! Place, bien plutôt, aux atmosphères ! L'essentiel n'est plus vraiment que le malfrat soit pris, mais qu'il soit compris. Que soient disséquées ses affres intimes, percés à jour ses motivations, ses mobiles. Que l'on saisisse pourquoi l'autoroute du bien s'est soudain vu préférer les voies secondaires du vice, ces dernières fussent-elles, presque à chaque fois, sans issue.

Dans ce genre de littérature — car, quoi qu'en pensent d'aucuns, c'est bel et bien de cela qu'il s'agit —, le corps, qu'on le découvre balafré, éviscéré, voire débité en rondelles (aux sciottes les détails sordides du saucissonnage !), comptera toujours moins que le décor. Ici le bajoyer d'une écluse vieillotte, où le commissaire à la pipe, en chaland nonchalant, va négligemment pousser ses propres péniches. Là les venelles moyenâgeuses de la cité rochelaise, sur les pavés disjoints desquelles se perpètrent, à la brune et sous la bruine, les plus inavouables des forfaits. Là encore, les arrière-cours de Manhattan, havres cotés avant qu'un certain Hitchcock ne s'ingénie à en faire les antres privilégiés du crime.

Il fallait à cet univers glauque son exact antidote : Jules Maigret ! Plus banal que ce roussin-là, tu meurs, et dans ton lit, par-dessus le marché ! Vacances pépères sur les versants érodés de la Schlucht (bobonne est alsacienne), retraite de pantouflard à Meung-sur-Loire. Tout juste si ses apocryphes Mémoires, obligeamment griffonnés par son créateur, confessent un péché mignon pour la choucroute et la blanquette, auxquelles il succombe tour à tour dans une espèce d'assommoir baptisé La Chope du Pont-Neuf. Un faible marqué, aussi, pour le billard, seul exutoire qui, étonnamment, ne mette pas en boule cette soupe au lait notoire ! Pouvait-on rêver mieux pour se raccommoder avec l'humanité ?

 

TEST

Trouvez l'arme du crime... ou plutôt son orthographe !

hache, arbalète, coutelas, sarbacane, boomerang, machette (fin pour les juniors) ;

cimeterre, pertuisane, baïonnette, yatagan, bazooka, tomahawk (fin pour les seniors amateurs) ;

kandjar, falarique, scramasaxe, claymore, nunchaku, schlass (fin pour les seniors professionnels).