Sur les traces de la rousse

(Comines, 2006)

Pourquoi m'en défendre ? Je suis de ceux qu'aucun livre ne laisse indifférents : bluettes sentimentales, romans de cape et d'épée, mémoires autobiographiques plus ou moins enjolivés, bandes dessinées, tout me sied. Pis : un simple canard m'agrée ! Mais n'en déplaise au qu'en-dira-t-on, je raffole par-dessus tout de ce que l'on appelle les polars. Ces derniers me coupent le souffle d'un bout à l'autre : des préliminaires, un rien embrouillés, à l'épilogue, forcément inattendu. Et poitrine qui halète, c'est bien connu, ne boit-elle pas du petit-lait ?

Envahissante, quasi obsessionnelle, la question pourtant ne varie guère : qui donc est l'assassin ? L'équarrisseur trapu, qui, pour une fois, n'aurait pas fait de quartier ? La marchande de quatre-saisons, qu'ont depuis toujours protégée, sans que l'on sût bien pourquoi, quelques légumes haut placées, de toute évidence à sa botte ? L'offsettiste qui, dès l'abord, et mon instinct de femme me trompe rarement, ne m'a pas fait bonne impression ? À moins qu'il ne faille aussi, par acquit de conscience, soupçonner l'insoupçonnable, à savoir ce philanthrope que plus d'un porte au pinacle...

Si seulement l'on savait de quoi s'est servi cette espèce d'escarpe ! Mais on n'a retrouvé, dans la demeure haussmannienne où a été perpétré le crime, ni schlass ni nerf de bœuf. Pas davantage, a fortiori, de ces armes exotiques ou surannées — navaja effilée, machette du Nordeste, voire vouge médiéval — qui m'auraient immanquablement mise au parfum, et ce détective d'opérette, ce faux bourre avec moi ! Qu'importe, du reste : le pot aux roses ne sera pas plus tôt découvert que le coupable se verra accorder les circonstances atténuantes. Ne suffit-il pas, aujourd'hui, d'avoir un père sicaire pour que les jurys vous fassent une fleur ?

 

TEST

Le polar, à quoi ça rime ? Allez savoir ! Mais avec quoi, c'est tout su : avec achards et pilchard, busard et balbuzard, camisard et maquisard, carrare et curare, casoar et bézoard, chambard et champart, cossard et corpsard, quasar et alcazar, samare et simarre, trocart et trinquart. Quel bazar ! Et surtout... quel cauchemar !