Chihuahua ! Chihuahua !

La France est aux abois...

< mardi 15 juillet 2003 >
Chronique

L'année 2003 restera-t-elle comme celle du chien ? Il est encore trop tôt pour le dire, mais force est de reconnaître que jusqu'ici ce dernier tient, sinon la corde, du moins la laisse. D'abord, il y eut Tony Blair, dont certains n'hésitèrent pas à faire le caniche de Deubeuliou. Puis l'intérêt marqué de notre Premier ministre pour les Pékinois : avant, nouveau Cerbère, de monter la garde au purgatoire, n'avait-il pas, on s'en souvient, poussé l'altruisme jusqu'à leur rendre visite en pleine épidémie de pneumonie atypique, et ce sans s'encombrer de la moindre muselière ? Ensuite ce fut Sarko qui, non content de jouer les limiers en Corse, se mua en saint-bernard à Paris pour ranimer son collègue Luc Ferry, à qui les enseignants gardent un chien de leur chienne : ils se promettent bien, d'ailleurs, de le lui faire savoir en septembre, au moment où ils auront à reprendre le collier. Et voilà qu'après avoir montré les crocs et appris par cœur les caniveaux qui séparent la Bastille de la Nation, la France entière se met à danser au rythme (supposé) du chihuahua. Mâtin, quelle année ! Il ne manquerait plus que nos Dogues soient champions d'automne, et la boucle serait bouclée... Mais revenons à notre chihuahua, ce pot-pourri d'Idéfix et de tequila qui, d'un strict point de vue lexicographique, a en effet tout pour plaire : la finale en -a qui, de Lambada en Macarena, signe, année après année, les succès estivaux ; cette initiale chuintante qui a tant fait pour le charme des Auvergnats en général, de Valéry Giscard d'Estaing en particulier, et qui prédispose à chérir et à choyer ; sans compter, pour nous Français, ce côté largement onomatopéique — un chi(en)-ouah-ouah, c'est à n'y pas croire — qui ne contribue pas peu, et c'est heureux, à couvrir le vide abyssal des paroles. Au demeurant, bornons là nos critiques : le responsable de la présente rubrique ne peut que se réjouir à l'idée que l'on fasse fortune avec un simple mot. Ses pensées vont cependant à Bernard Pivot, lequel ne pourra plus guère compter, à l'avenir, sur le chihuahua pour surprendre ses candidats. Bled merci, s'il a abusé déjà du mastiff et du grœnendael, il lui reste le schipperke. Aussi bien, les institutions ne meurent jamais. Comme on dit sur le Tour de France : « Les chihuahuas aboient, la caravane passe... »